Cette année encore, il aura fallu attendre que Médiapart s’empare du Rapport au Parlement sur les exportations d’armement de la France pour que le document, sensé paraître tous les ans aux alentours du mois de juin, soit rendu public.
Avec 21,6 milliards de commandes, l’industrie d’armement française a connu une nouvelle année faste en 2024, tandis que partout en France les salaires stagnent, le coût de la vie augmente et les services publics se délabrent.
Dans le même temps, alors que 2024 a vu non seulement la continuation mais aussi l’amplification du processus génocidaire mené par Israël, accompagné de tergiversations et de déni du gouvernement français concernant sa complicité directe dans ces crimes, les commandes d’armes israéliennes, loin de diminuer, ont atteint 27,1 millions d’euros, leur somme la plus haute depuis 2017.
Les catégories concernant les 50 licences d’exportation accordées par le gouvernement, bien qu’imprécises, sont parlantes :
- « Munitions et dispositifs de réglage de fusées »
- « Bombes, torpilles, roquettes, missiles »
- « Navires de guerre »
- « Aéronefs et leurs composants »
Le Rapport au parlement sur les exportations d’armes de la France ne rend compte que des exportations directes de matériel strictement militaire. Des armes et leurs composants, donc.
À la lecture du rapport, nous avons pu constater que le ministère des armées a pour la première fois consacré un encadré particulier à la justification des exportations d’armement vers Israël. Le fait que le ministère ressente le besoin d’ajouter ces explications spécifiques ne peut être perçu que comme une « réponse » à la campagne contre le commerce des armes avec Israël et une preuve que la pression exercée fonctionne.
Parmi ces « explications » on retrouve la prétendue nécessité d’autoriser « un flux de composants pour munitions qui seront réexportés vers la France », justification avancée en juin dernier concernant les maillons vendus à Israël par l’entreprise marseillaise Eurolinks ; ainsi que la phrase martelée depuis maintenant deux ans par le gouvernement : « la France ne livre pas d’armes à Israël mais exporte des composants ayant vocation en particulier à être intégrés dans des systèmes défensifs ou à être réexportés vers des pays tiers ».
On est en droit de douter de la véracité de ces informations : parmi les livraisons d’armes révélées par la presse ces derniers mois, on retrouve des radars produits par Thales qui équipent des drones de combat israéliens, des roulements produits par Timken destinés aux chars Merkava, des tubes de canons fabriqués par Aubert&Duval et achetés par Elbit. Des composants tous nécessaires au bon fonctionnement d’armes létales.
Mais même si chacune de ces justifications était vraie, qui pourrait encore les accepter ?
Des composants dédiés à des systèmes défensifs ? Outre le fait qu’Israël prétend que l’ensemble de la guerre génocidaire menée à Gaza n’est qu’une vaste opération défensive, les systèmes de défense tels que le dôme de fer sont la condition de l’impunité totale dont Israël bénéficie.
Des composants pour des armes réexportées vers des pays tiers, voire vers la France elle-même ? La France engraisse donc l’industrie d’armement israélienne, l’aide à exporter ses armes « combat proven » à Gaza pour semer la guerre et la mort dans d’autres régions du monde, considère que les entreprises dont les armes qui tuent les palestiniens par centaines de milliers sont des partenaires économiques acceptables que ce soit pour vendre à l’étranger ou pour répondre à ses propres « besoins » militaire.
Grâce à l’étude des chiffres d’importation des douanes israéliennes (voir notre rapport paru en juin dernier : Livraisons d’armes de la France vers Israël : Un flux ininterrompu) nous savons désormais que les commandes passées par Israël donnent lieu à des livraisons de matériel presque tous les mois, et qu’elles ont continué au même rythme en 2025.
Alors que les peuples du monde s’unissent et organisent des flottilles courageuses pour briser le blocus sur Gaza face à la complicité coupable des gouvernements mondiaux, n’attendons rien de Macron et Lecornu et unissons-nous également pour mettre un terme à tout commerce d’armement avec Israël !